SANCHIDRIAN Georges

SANCHIDRIAN Georges
réseau GALLIA-DARIUS
SANCHIDRIAN Georges

Sanchidrian Georges
Né le 11 septembre 1905 à Oran (Algérie)

Admis à l’École Polytechnique, n° 2787, le 16 septembre 1925, il sort en 1927 comme technicien radio.
Nommé Sous-lieutenant le 15 septembre 1927, affecté à l’Etat-major particulier de l’Artillerie à Fontainebleau.
Ingénieur des PTT en 1935. Directeur du bulletin officiel hebdomadaire de l’Amicale de radio PTT Alger.

Agent de renseignement du Réseau GALLIA-DARIUS
Chargé de mission de 2ème classe, à compter d’octobre 1943

Avis du Chef de réseau :
« Ingénieur des P.T.T. : tout d’abord agent P.1. a rendu de grands services au Réseau par les renseignements précieux qu’il communique au sujet des lignes et câbles téléphoniques secrets de l’ennemi.
Il fut arrêté le 8 juillet 1944 à Garches (Hauts-de-Seine) ; interné à la prison de Fresnes puis déporté le 15 août 1944 par le convoi parti de Pantin pour Buchenwald où il a le matricule 76 840.
Transféré à Dora puis à Ellrich où il a été incinéré le 10 avril 1945, au camp de Ell’Rich. »
« Mort pour la France».

Extrait du Livre Mémorial des camps de Dora-Ellrich et Kommandos édité en 1949 Paris
Chapitre histoire d’un block Page 71 /72/73
_….. Théo occupât les nudistes à de menus travaux, il désigna des électriciens, des menuisiers, des plâtriers et des peintres. Une couverture enroulée autour du ventre, ils allaient et venaient, et on les appelait les « Péplums ».
Comme le rythme des morts s’accélérait, les SS n’osèrent plus faire l’appel des hommes nus sur la place glaciale et permirent qu’il se fît dans le bloc, mais toutes fenêtres ouvertes. En plein courant d’air, par -20° ; les « Péplums » tremblaient pendant 1h 00, quelquefois deux. Théo bloqua les fenêtres de telle sorte qu’il fut impossible de les ouvrir, et un peu plus tard, il décida lui-même de faire l’appel dans la pièce chauffée par le grand poêle. Il eût plus tard la lubie d’embellir le bloc et dénicha un excellent plâtrier français qui plâtra les murs. Ensuite il voulut des peintures…
Tanguy, un jeune élève des Beaux-Arts de Paris, fit un splendide tableau d’automne et les jours qu’il passa à le peindre furent pour lui une évasion miraculeuse de ce monde qu’il ne comprenait pas vers les douces landes dorées de Bretagne, où, si souvent autrefois, sa mère et lui se promenaient.
Un soir de décembre, Tanguy s’éteignit parmi ses camarades. Il avait 18 ans.
Alors, ce fut le tour de Georges Sanchidrian, un ingénieur de l’État, ancien élève de l’école polytechnique. D’un caractère ardent, la vie avait toujours bouillonné en lui, et s’il n’était naturellement plus question de se préoccuper de cette forme physique que, sportif, il avait tant soignée, en revanche, l’inactivité intellectuelle était atroce pour lui. « Si seulement je pouvais lire ! » Disait-il souvent. Il « relisait » en son étonnante mémoire et il racontait des livres entiers à Jacques, à Clément, à Gustave. Le soir, sur la paillasse qu’il partageait avec Jacques, il lui racontait sa vie et dans ce reflet doux et brillant du passé si proche encore, ils s’évadaient aussi. « Je ne suis pas ici, je suis à Paris, chez moi », murmurait-il parfois. Peut-être brûlait-il ainsi plus vite ses dernières forces nerveuses, mais ses amis l’écoutaient, même ceux qui, dans la crainte de fléchir, se refusaient à penser à leurs foyers, et tous s’évadaient un peu avec lui. En tout cas, on l’aimait, car il était doux et bon et tous se réjouirent lorsqu’il fut désigné pour succéder à Tanguy. Avec deux pinceaux et cinq couleurs, il anima les tristes murs de grandes fresques et lorsqu’il eut achevé la place Pigalle un soir de 14 juillet, il passa dans le bloc comme un souffle de Paris. Cela créa une atmosphère un peu particulière au block quatre, et dans cette immense misère, il y eut presque des minutes de douceur. Comme dans les longues traversées les passagers se lient d’amitié, dans ce vaisseau tragique qui les emportait vers leur destin, les hommes se serrèrent plus près les uns des autres. Aussi longtemps qu’ils en eurent la force, ils formèrent une sorte de cercle où l’on n’approfondissait aucun sujet, mais où tous les problèmes étaient abordés ; « Boubouroche » était un érudit, Georges Sanchidrian, un puits de science, et René, qui venait presque chaque jour les rejoindre, une encyclopédie vivante.
Serge, Marc, Tanguy, Georges, Michel, Pierre, Jean-Louis, René, chers visages disparus … Et le jeune pêcheur breton qui chantait d’une si jolie voix de vieilles chansons de France… Et tous les autres dont les noms se sont évanouis, mais qui demeurent dans le souvenir des vivants… Cependant, cette harmonie fut brève. Une réorganisation du camp vint la rompre. Tous les hommes d’un Kommando furent réunis dans le même block. Un kommando, un bloc, et beaucoup d’amis se durent se séparer. Michel parti au block 10, en proie à un profond chagrin, et chaque fois qu’il le pouvait, Clément, Claude et Georges allaient le voir. Vinrent alors des jours plus cruels encore. L’eau gela dans les conduites et le camp, avec ses 8000 hommes, resta deux mois et demi sans eau potable. Brûlés par la fièvre, ils suçaient les boutons de leur veste et se jetaient sur l’eau corrompue. Les amis s’épuisaient en conseils et en encouragements réciproques : l’optimisme invincible de Jacques qui n’avait que 22 ans et qui ne connût jamais un jour de répit, l’éternel sourire de p’tit Louis furent précieux aux coeurs sans illusion. Mais un soir, à la fin de décembre 1944, le kapo Bruno vint, triomphant, annoncé que les Allemands étaient à 15 km de Paris. Cette nouvelle porta un coup terrible et chaque jour plus de 100 hommes mouraient. D’ailleurs, le Revier n’avait pas de médicaments et bientôt le pain manqua. Une boule pour six, puis plus rien ; on le remplaça par 1 l d’eau chaude.
Au mois de janvier 1945, il y eut un arrivage de vêtements ; on rhabilla les « ohne kleider » qui repartirent sur les chantiers, où la plupart moururent rapidement. À la fin du même mois, les malades quittèrent le block 4 pour aller au « schönung » , nouvellement installées au block 10. L’effectif du block 4 tomba à 250 hommes, mais fut bientôt augmenté par les convois venus d’Auschwitz et de Monowitz : quelques rares Français, ayant beaucoup souffert, mais surtout des verts allemands, des Polonais et des juifs apatrides, gros et gras, anciens fonctionnaires des camps évacués, véritables brutes qui exigèrent dès leur arrivée, déplace dans le block. Léon, le stubedienst polonais, dut céder son poste à un Allemand qui ne savait que frapper et le block fut de nouveau plongé dans la terreur.
À la fin de février, ont réuni à l’ancien Revier les « Transports » et le 3 mars, ce fut le grand départ. Attendu depuis plusieurs mois, ce départ dont on avait tant parlé, laissa totalement indifférents ceux qui partaient, leurs nerfs étaient à bout. Le block 4 livrait à ce transport 47 Français ou Belge.
Quelques jours après, la pancarte des effectifs journaliers notait 125 hommes et parmi eux une poignée à peine de français. Cependant, les premiers rayons du printemps, les échos de l’avance foudroyante des alliés, confirmés par le repli sur Ellrich du camp de Usedom près de Stettin, insufflaient à ses ombres encore un peu de courage.
Mais Théo fut alors disgracié est remplacé par l’ancien Kapo des cuisines de Usedom, un « vert » qui n’était pas une brute, mais qui laissait taper son stubedienst comme un sauvage.
Le camp dEllrich touchait au terme de sa triste existence : cédant à l’avance des Américains, les SS l’évacuèrent les 4 et 5 avril1945. De ces deux convois, l’un libéré à Bergen-Belsen par les Anglais, l’autre à Orianienbourg par les Russes, 230 Français devaient survivre dont 12 seulement du block 4 …

Identification : Clément TERRAL 77670 – Jacques GRANDCOIN 77982 – Georges SANCHIDRIAN 76840 –
Tanguy TOLILACROISSANT 77302

Sources : La Fondation pour la Mémoire de la Déportation – Commission Dora Ellrich – www.http://dora-ellrich.fr
Amicale Dora Mittelbau – Archives de la famille de Georges SANCHIDRIAN – Souvenir de Mme Claude Plocienak et plus particulièrement de son livre « Allo Alger ? Ici la Résistance ». Editions THELES – 2006 – ISBN 2 84776 – 608 1

Remerciements à F. Bulfay de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation, à Pierre Gentil, fils du Colonel GENTIL, chef du réseau DARIUS décédé le 8 avril 1945, au camp de concentration de Dora.