L’Amicale mémoire du réseau Gallia, issue en 2001 de l’Amicale du réseau Gallia (fondée en 1946) compte aujourd’hui 70 membres qui s’efforcent d’entretenir la mémoire de ce réseau de renseignement militaire français.
Les anciens agents du réseau et leurs descendants publient chaque trimestre un bulletin dans lequel figure le récit d’un des leurs sous l’occupation allemande et italienne, de 1940 à 1944.
Le réseau Gallia est né de la mission Gallia confiée, par le colonel Dewavrin dit Passy à Londres au Bureau Central de Renseignement et d’Action (B.C.R.A.), le 15 février 1943, au colonel Gorce dit Franklin. Franklin est en charge de réunir les services de renseignement militaire œuvrant sur le territoire français en zone Sud, sous la houlette de Jean Moulin.
La mission évoluera vers un réseau autonome à la fin de l’été 1943 en agrégeant d’autres réseaux existants et en fonctionnant directement avec Londres. La nébuleuse Gallia couvrira l’ensemble du pays et une partie des territoires frontaliers dès le dernier trimestre 1943.
On évalue, toutes sources confondues, à près de 4500 agents ayant eu une activité « officielle » dont une centaine sera fusillée, exécutée ou disparue. Le nombre d’agents morts, (ou revenus), en déportation fait l’objet d’une étude.
Centré sur la collecte de renseignements militaires sur papier selon des critères de description rigoureux puis codés, le réseau les achemine selon une procédure spécifique à Londres, avant d’être transmis ultérieurement par radio, pour informer les états-majors alliés.
C’est une partie de ces activités que tente de restituer notre bulletin.
1943. En France occupée, la Résistance s’est structurée, l’introduction du Service du travail obligatoire (STO) nourrit les maquis. À l’extérieur, la France Libre (au nom bien justifié) combat aux côtés des Alliés britanniques, américains et soviétiques.
Dans le même combat, un rôle discret mais important est tenu en France occupée par les réseaux rattachés au B.C.R.A. de Londres, dont les actions se développent dans le secret, sous la bannière des Forces Françaises Combattantes (FFC). Grâce aux réseaux de renseignement, les commandants interalliés, les Forces Françaises Libres (FFL) vont disposer d’informations précises sur les dispositifs, les moyens, les projets des occupants.
Parmi ces réseaux, GALLIA a été un des plus importants et des plus efficaces: c’est en février 1943 qu’Henri GORCE arrive de Londres pour cette création à partir d’éléments détachés des services de renseignements militaires des Mouvements Unis de la Résistance (MUR).
Ce réseau, centré sur Lyon, sera fort, avec ceux qui lui seront rattachés et ses moyens radio de transmission, de quelques 3000 agents ayant souscrit un engagement dans les FFC. La rapidité avec laquelle cette force clandestine a été montée, étonne rétrospectivement.
La plupart de ces femmes, de ces hommes de tous âges de tous les milieux ont aujourd’hui disparu ; beaucoup d’entre eux étaient restés groupés dans une Amicale, qui mérite bien son nom. Pendant plus de 50 ans, un bulletin trimestriel, des réunions, ont constitué un lien entre anciens de GALLIA ou leurs proches, autour des souvenirs des actions du réseau. Un travail historique (1) sur GALLIA, dirigé par le professeur AZEMA, a été provoqué et nourri par notre Amicale. La volonté d’assurer une prolongation à ces travaux de mémoire nous a conduits à deux décisions complémentaires : ouverture de notre Amicale aux générations d’après-guerre et rattachement à la Fondation de la Résistance et à la Fondation de la France Libre, que nous remercions de leur accueil.
Voici brièvement, l’histoire de ce célèbre réseau :
« Durant l’hiver 1942/43, le Bureau Central de Renseignement et d’Action élabore la mission Gallia, destinée à « coordonner et unifier le service de renseignement des Mouvements Unis de Résistance ». Le renseignement constituant un enjeu essentiel pour la France Libre, il s’agit en fait de prendre le contrôle du SR des MUR et de l’incorporer dans un réseau unique, le réseau Gallia. Cette mission est confiée par le général De Gaulle à Henri Gorce dit Franklin. Rescapé du réseau Interallié celui-ci a gagné Londres en octobre 1942 et a été recruté par le B.C.R.A..
En février 1943, Henri GORCE atterrit près de Lyon et, après quelques tergiversations, est introduit devant le comité directeur des MUR en avril 1943. Il s’y heurte à Henri Fresnay, chef du mouvement Combat, qui est soucieux de conserver son indépendance face à la France Libre. Seul un accord technique est conclu : le SR des MUR, dirigé par Jean Gemähling, fournira un double de ses courriers concernant le renseignement militaire à Gallia.
Henri GORCE décide alors de constituer un réseau de renseignement à part entière. Il s’appuie sur des éléments issus de Libération-Sud, notamment Albert Kohan, ancien chef de région de ce mouvement, qui devient l’adjoint d’Henri GORCE et de Franc-Tireur, grâce à l’entregent d’Eugène Claudius-Petit. Ce réseau s’articule en antennes régionales situées en zone Sud. Henri GORCE s’efforce d’imposer un cloisonnement rigoureux entre les agents du réseau et les mouvements dont ils sont issus, mais la plupart conservent une double affiliation. Entre mai et août 1943, le réseau est décimé par une vague d’arrestations à laquelle Henri GORCE échappe de justesse.
Il s’attelle alors à la reconstitution du réseau Gallia en s’appuyant cette fois sur des militaires en congé d’armistice, parmi lesquels le colonel Louis Gentil, qui devient son adjoint.
Le réseau regroupe dès l’automne 1943 sept régions couvrant l’ensemble de la zone Sud, avec Centrale et services à Lyon. Il rassemble 19O2 agents. Il intègre aussi plusieurs sous réseaux notamment le réseau belge Reims-Noël. Un cloisonnement rigoureux est imposé. Le réseau organise également ses liaisons radio et aériennes. Son efficacité croissante lui permet l’envoi d’un courrier de 2500 pages tous les quinze jours en juin 1944. À cette époque, il s’est étendu avec beaucoup plus d’intensité en zone Nord (Réseau Darius).
Parallèlement, le réseau Gallia est impliqué dans le conflit opposant la France Libre à Combat sur la question de la transmission des renseignements.
Le B.C.R.A. réclame l’exclusivité, il l’obtient finalement.
Des arrestations ébranlent régulièrement le réseau Gallia, mais, grâce au cloisonnement, elles ne mettent pas en péril son existence même.
L’alerte la plus chaude se produit en décembre 1943 quand le chef du service des liaisons du réseau, Jacques El-Maleh, est arrêté. Il est abattu en tentant de s’évader de la prison de Montluc à Lyon. Quelques semaines auparavant, il s’était distingué en escortant le général de Lattre de Tassigny, après son évasion de la prison de Riom, entre l’Auvergne et Lyon et venait de terminer une inspection des régions GALLIA.
En mai 1944, le sous réseau Reims-Noël est quasiment détruit, ses liaisons ayant été « remontées » par le SD. Son chef, Georges Oreel, est abattu.
Le même mois, Louis Gentil, qui a pris la tête du réseau Darius, est arrêté et déporté au camp de Dora. Il y sabote des pièces de V 2. Il décède peu avant la libération du camp.
Le 4 août 1944, suite à l’investissement, la veille, du poste de commandement régional de Grenoble, la Centrale lyonnaise du réseau est découverte par le SD et tout le personnel arrêté. Henri GORCE, qui se trouve à Paris, échappe au coup de filet.
En raison de la décentralisation du réseau mise en place au printemps 1944, et de l’accélération des événements, les dommages restent limités, mais 15 membres du réseau Gallia sont fusillés au fort de St Genis Laval le 20 août 1944.